Des armes à la trace ?

Le 12 mai 1966, l’arrangement de Wassenaar – du nom d’une ville des Pays-Bas – est créé et permet un régime de contrôle des exportations, dans le but de contrôler les exportations et les importations d’armes. En 2012, une quarantaine d’Etats avait signé cet accord dont la France, les Etats-Unis, l’Allemagne et la Russie. Ces quatre Etats sont dans le top dix des Etats exportateurs d’armes. Certains Etats signataires de l’arrangement de Wassenaar ont également fait le choix de marquer les armes produites et de les tracer informatiquement. Ainsi, le Canada a investi 60 millions de dollars américains pour mettre en place le Registre des armes à feu et suivre les quelques 3,5 millions de détenteurs d’armes à feu. Cet investissement a été rapidement rentabilisé par le paiement d’une taxe de 12 dollars américains pour chaque arme enregistrée. Il existe différents marquages des armes à feu, notamment des numéros d’identification unique qui permet de remonter au fabricant, au pays du fabricant ainsi qu’au propriétaire. Le problème de ces marquages traditionnels est qu’ils sont faciles à effacer et ne permettent pas de passer outre les différents montages mis au point par des sociétés écrans.

Dès le début des années 2000, la possibilité de marquer électroniquement les armes a été évoquée. L’idée était de marquer avec des puces électroniques les armes dans des endroits spécifiques des armes à feu à l’aide d’un marquage d’identification unique. Une autre option avait été proposée : celle des codes-barres. En Afrique du Sud, un système de crosse intelligente avait été testé et a été mis en place en Russie en 2012. Le principe est d’une simplicité enfantine : une puce est intégrée dans l’arme à feu, puce qui donne des informations sur le propriétaire légitime qui a acheté et enregistré son arme à feu de façon licite. Les informations récoltées sont les empreintes digitales, la photographie du propriétaire et certaines données biométriques. Des capteurs sont placés sur la crosse de l’arme ainsi que sur le percuteur et sur le viseur. Si une personne qui n’est pas le propriétaire légitime de l’arme essaie de s’en servir, il ne pourra pas, l’arme est bloquée.

En Afrique du Sud, le dispositif a été jugé trop onéreux pour être mis en place mais la Russie a franchi un cap en 2012 malgré les réserves de certains experts. Le raisonnement des autorités russes a été de dire que la majorité des armes qui circulent de façon illicite ont un jour été sur le marché régulier. En puçant les nouvelles armes, on peut espérer assécher le marché parallèle en moins de dix ans.

En terme de protection de la vie privée, il est évident qu’il y a de quoi bondir car les données récoltées sont très sensibles (empreintes digitales, iris, données biométriques) et que le fichier qui compilera l’ensemble de ces données devra être sécurisé. De la même façon, il serait très naïf de croire que les personnes se fournissant sur les marchés parallèles ne trouveront pas des moyens de casser le système. Cela ne résoudra évidemment pas le problème des armes déjà en circulation mais si toutes les armes à feu qui sont mises sur le marché régulier étaient marquées, on pourrait faire avancer la lutte contre les organisations criminelles.  

Quelques heures avant les attentats du 13 novembre 20115, le Ministre de l’Intérieur avait annoncé un grand plan de lutte contre le trafic d’armes et après les attentats, en une semaine, les forces de police ont procédé à 793 perquisitions en 7 jours. Dans ces perquisitions, il a notamment été retrouvé des armes dont on ne sait pas encore d’où elles proviennent. Alors que le même Ministre de l’Intérieur milite activement pour que les déplacements au sein de l’Union Européenne soient centralisés un PNR, il serait peut-être temps de réfléchir à un fichier centralisé des armes à feu.

L’une des forces de frappe de l’Etat Islamique réside dans sa communication notamment numérique mais là aussi, nous pouvons tout à faire les contrer et contrairement aux deux autres hypothèses évoquées précédemment, sans nécessairement avoir un budget faramineux. 

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